Départ à la retraite : entre angoisse et enthousiasme

Chaque peuple, chaque territoire a une vision qui lui est propre du vieillissement et de cette autre partie de la vie que constitue la retraite. Certains pays ont fait le choix de ne pas l’institutionnaliser. Tandis que d’autres comme le France notamment, ont développé un système de protection sociale incluant celle-ci.

Ainsi, jusque dans les années 1960, pour une partie de la population des territoires d’Outre-Mer, cette dernière était comme inexistante. Autrefois, les vies professionnelles et familiales étaient orchestrées de telle sorte que le cheminement était le même pour tous, avec la même date de début et la même date de fin. Les situations de centenaire relevaient surtout de l’inaccoutumé.

C’est toujours le bon moment pour les choses exceptionnelles que nous offre la vie.

Les obligations du quotidien laissaient peu de place à l’improvisation et au questionnement sur « l’après ». Le rythme et les conditions de vie ainsi que l’espérance de vie ne laissaient ni le temps ni l’espace pour se questionner sur cet « après ». L’espérance de vie était relativement courte puisque chacun était finalement usé par les activités quotidiennes.

En l’espace d’une vingtaine d’année, les évolutions sociales et sociétales se sont succédées et ont considérablement modifié cette perspective.

Une fois que cette étape de la vie a été institutionnalisée et intégrée dans les fonctionnements individuels, le départ à la retraite s’est ensuite presque apparenté à cet eldorado, ce moment de la vie où tout devient possible et réalisable. Nombreux sont ceux qui se disaient ( ou se disent encore aujourd’hui pour ceux qui seront prochainement concernés ) :

« Quand je serai à la retraite, je ferai…ceci.»

« Quand je serai à la retraite, je voyagerai.»

« Quand je serai à la retraite, je m’achèterai telle voiture .»

« Quand je serai à la retraite, je me ferai plaisir. »

Les mêmes conditions qui auront favorisé l’engouement pour cette étape de la vie vont aujourd’hui symboliser un véritable séisme dans le quotidien de certains. Les représentations de chacun ont aussi évolué quant à la question du départ à la retraite, sans compter la technicité qui est aujourd’hui nécessaire pour y accéder.

Aussi, la juxtaposition de différents contextes (politique, économique, législatif, environnemental, social, culturel) permet aujourd’hui de justifier que certains salariés soient passés d’un état d’impatience à un état d’anxiété à l’annonce de la fin de carrière professionnelle. Certains vivent cette étape de la vie comme une contrainte, comme la menace d’un couperet inévitable, d’un coup de pied en guise de remerciements.

Pour autant, je m’hasarderai à défendre cette étape cruciale de la vie. Le départ à la retraite est d’une certaine manière victime de mauvaise presse. Parfois associée à la fin de vie, elle renvoie aussi à une impression de perdre sa place. Comme si la vie menée jusque là se vidait de tout son sens. Le départ à la retraite met en exergue la dissymétrie entre les repères du futur retraité et cette société qui ne cesse d’évoluer. Elle génère cette sensation d’être dans l’incapacité de comprendre voire même de faire au même rythme que les autres et comme les autres.

Pour appréhender cette étape, ce sont la procédure, le mode de calcul, ou encore les droits connexes qui sont abordés. Une approche qui se veut purement technique.

La retraite est devenu un enjeu de société, prenant presque la forme d’une joute entre les différentes générations présentes sur le marché de l’emploi et occultant tous les aspects positifs d’une existence multigénérationnelle.

Les protagonistes oublient qu’une vie comporte plusieurs étapes et plusieurs cycles. L’allongement de l’espérance de vie a d’une certaine manière mis en exergue cette perspective. La cessation d’activité n’est le synonyme ni de la fin de vie ni d’un exil nécessaire.

Il ne s’agit pas seulement de prendre en charge le vieillissement de la population mais davantage d’accompagner le passage de cette nouvelle étape de la vie. Loin d’être une contrainte, il doit résulter d’un choix guidé, étayé.

L’accompagnement peut être bénéfique pour ceux qui sont prêts, mais il l’est d’autant plus pour ceux qui se posent des questions, ceux qui ont du mal à se projeter, ceux qui ne comprennent pas les documents reçus et les démarches à réaliser, ceux qui sont anxieux face à l’inévitable.

Afin d’être perfectible, cet accompagnement doit se mettre en place le plus en amont possible, bien avant la date de cessation d’activité annoncée.  Alors, n’attendez pas !